Adresses Chroniques

La guinguette d’Alriq rouvre ses portes à Bordeaux : c’est le bon plan de l’été!

18 juin 2015
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Je ne suis pas née à Bordeaux, mais quand j’y suis arrivée en 2002, la Guinguette d’Alriq s’est immédiatement imposée comme l’une des adresses alternatives les plus emblématiques de la ville. Je me souviens des concerts où tout pouvait basculer et on terminait la soirée en dansant. Je me souviens du confit de canard que je prenais tout le temps, avec son petit gratin dauphinois. Je me souviens de ce grand gaillard qui m’intimidait, le bonnet vissé sur la tête, que je regardais avec admiration. Et je me souviens surtout de cet incroyable jardin en bord de fleuve, le spot par excellence, qui offrait la meilleure vue de Bordeaux.

Chaque Bordelais porte Alriq en son âme, sans forcément pouvoir l’expliquer. Alors quand la page s’est tournée brutalement en juillet 2013, à la suite d’un contrôle sanitaire, notre cœur à tous s’est un peu serré. Evidemment des règles n’étaient pas respectées, évidemment il y avait des manquements, mais tout doit-il vraiment devenir aseptisé et uniforme ? L’avantage avec les pages, c’est que quand elles se tournent, il y en a d’autres derrière. Et elles peuvent faire partie du même livre.

Ce jeudi 18 juin 2015, l’appel ne vient pas de Londres mais de la rive droite, où le phénix renaît de ses cendres : la Guinguette Chez Alriq rouvre ses portes, avec aux commandes Virginie Alriq et Pierre Manescau, et quelque part entre Darwin et les Chantiers de la Garonne, Philippe Barre qui veille au grain. Et guinguetta non delenda est ! [Au registre des sociétés, la Guinguette d’Alriq » se nomme EGNDE, « Et Guinguetta Non Delenda Est », un cri du cœur qui signifie en latin « La guinguette ne sera pas détruite ».]

Dans la famille Alriq, je demande la nièce, Virginie. Bonne pioche. Elle m’attend au milieu du jardin détrempé, surveillant d’un œil attentif les travaux qui vont bon train. Par ici on monte le plancher, par là on élague des arbres, au fond on s’attaque à une structure en acier. J-6 avant l’ouverture, tout sera-t-il prêt ? « Il le faut ! Avec deux semaines de plus on aurait été bon, là c’est un peu court. Si le restaurant n’est pas encore tout à fait en place, on lancera le système D, en mode barbecue géant. Après tout l’esprit Alriq c’est aussi ça, le royaume de la démerde ! ». Le ton est donné.

C’est en 1990 que Christian Alriq a ouvert sa guinguette. Il faut imaginer ce qu’était la rive droite à l’époque, une vraie décharge naturelle. Après une cabane à frites au Grand Crohot et un restaurant rue Leyteire, Alriq avait investi ce terrain en bord de Garonne, pour en faire un lieu de rencontre populaire, un lieu familial où l’on pouvait danser. Une cabane retapée, des spectacles sans scène, des toilettes dans la nature… Virginie se souvient comment Alriq et sa bande ont bricolé et aménagé le lieu, année après année, pour en faire un restaurant atypique, sauvage et brut, alternatif voire militant.

De son côté, bien qu’issue d’une famille de restaurateurs, Virginie n’a jamais eu l’ambition première de suivre cette voie. Après des études d’archéologie et d’histoire à Paris, elle a décidé d’embrasser à son tour cette carrière avec son compagnon Pierre Manescau, alors responsable financier. Ils sont rentrés à Bordeaux, Pierre a passé un CAP Cuisine, et ils ont ouvert le Café Ballon en 2008, aux Chartrons.

Dès 2011, Alriq a cherché à céder son affaire, sans pour autant trouver preneur. Il était plus ou moins entendu que la nièce reprendrait le flambeau, mais en douceur, si l’oncle ne trouvait personne. En 2013, Pierre et Virginie ont donc cédé le Café Ballon, pour devenir salariés de la Guinguette. Les choses se sont précipitées en juillet de cette année-là, quand 25 inspecteurs ont débarqué à la Guinguette pour un contrôle sanitaire. Le verdict a été sans appel. Fermeture immédiate. Aucune possibilité de phaser les travaux. Alriq était dans une situation financière fragile, et malgré le soutien des Bordelais, il n’a pas pu s’en sortir. Pierre et Virginie ont donc repris le flambeau, grâce aussi à Philippe Barre et au Groupe Evolution, qui a investi 40% de la nouvelle structure. Leur objectif : perpétuer l’histoire, préserver l’âme de ce lieu unique.

L’âme vous dites. Mais comment la définir ? Pour Virginie, la Guinguette c’est une philosophie, une façon d’être, une programmation, une charte de comportement avec les clients, une éthique. L’âme d’Alriq c’est la démerde, faire avec les moyens du bord, mais – et ceci est peut-être nouveau – tout en respectant les règles. Ils sont conscients de leurs responsabilités vis à vis des clients, en termes de sécurité et d’assurance, c’est pourquoi ils ont réalisé tous les travaux nécessaires afin d’obtenir les autorisations administratives en vigueur.

L’été dernier, pour une saison de transition, le jardin de la Guinguette était ouvert, avec un bar extérieur offrant boissons et planches apéros. Cette année, c’est le restaurant qui ouvre ses portes, avec une carte simple de produits de saison, trois entrées, trois plats, trois desserts. Il faudra attendre 2016 pour que l’espace soit clos et puisse ouvrir l’hiver. En attendant, le préau, astucieusement pensé par les architectes, protègera des intempéries le temps d’une saison en bord de fleuve.

La programmation musicale sera riche, le bar du jardin restera ouvert et accessible sans réservation.

Et que les plus nostalgiques soient rassurés, le self-service au plateau est toujours d’actualité chez Alriq, mais dorénavant, c’est votre petit vibreur personnel – technologie oblige – qui vous signalera que vos plats sont prêts.

Rendez-vous dès le jeudi 18 juin 2015 à partir de 19h à la Guinguette Chez Alriq, quai des Queyries, pour l’ouverture de la saison, avec un « bal interterrestre » du groupe Antiquarks dès 22h.

Une chronique rédigée pour Sud-Ouest Gourmand

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